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Publié par Gérard Glatt

un-mauvais-fils-bel.jpgIl s'appelle Zacharia, il est né en France, à Paris pour être précis, mais Algérien d'origine, il est homosexuel, et jeune, et un peu tout fou. Et puis, au fond, pas si Mauvais fils que ça... Est-ce en clin d'oeil à La mauvaise vie de Frédéric Mitterrand que ce titre a été retenu ? Aucun rapport, pourtant. On en aurait donc préféré un autre, plus révélateur. Mais peu importe, car nous suivons tout de même le gaillard avec intérêt, bien que nous ne sachions jamais où son auteur souhaite en venir, ce qui est, parfois, un peu agaçant.

 

Zacharia est donc homosexuel. Et comme bon nombre, dès l'âge de cinq ans, ou peut-être avant, car il est précoce, il se rend bien compte qu'il n'est ni ne sera jamais comme tout un chacun - c'est du moins ce qu'on prétend -, c'est à dire un hétéro, un vrai ! Et se savoir homosexuel, chez les Arabes : aie ! aie ! aie ! Ce n'est pas moi qui le dit, c'est Zacharia qui nous l'assure. Mais je ne suis pas loin de le croire !

 

Entre son père et sa mère, ça ne va pas fort. Lui, une véritable brute ! Pas du tout ce qu'il faut pour des âmes sensibles, obligées d'intervenir lorsque le maître de séant rentre à la maison, ivre et titubant, pour éviter le pire. Malheureuse comme la pierre, mais belle âme, la pauvre mère a reporté tout sa tendresse sur ses enfants, dont Zacharia.

 

Le décor est planté. Notre jeune héros n'a plus maintenant qu'à grandir. Pas toujours facile, à cause des origines. Mais bon, on n'est tout de même pas un gosse de banlieue. Alors, on ne se défend pas si mal. Au bac, Zacharia obtient même la meilleure note en philo. Mieux encore : au même âge, son sexe s'est déjà transformé en tête chercheuse. Il faut bien aussi gagner son argent ! On ne compte plus alors les expériences : elles sont de toutes sortes, se passent en tous lieux et sous toutes les formes, se prénomment, entre autres, Hocine, Abou, Fabien, David, Gaetan, Salim, Benjamin, Alfredo, j'en oublie, sauf Vincent, le plus vieux, ridé, rabougri, avocat d'affaires paraît-il, mais à qui tout est pardonné : vive New-York ! On attend la suite...

 

Bien sûr, en refermant ce livre (pour adulte), on pourrait se dire qu'on s'est bien amusé, ou qu'on s'est ennuyé, selon l'humeur, que c'est du Marc Lévy, un peu moins bon ou tout juste meilleur, mais je crois que l'on aurait bien tort. Parce que le style est là ! Ce Mauvais fils aurait-il été édité chez Verticales, qu'il aurait eu le succés d'Entre les murs, de François Bégaudeau. La seule différence entre les deux, je reconnais qu'elle est de taille, c'est qu'il aurait fallu aussi, pour cela, qu'Ilmann Bel écrive Entre les murs. Et là, problème : car ce n'est pas entre des murs que Zacharia tente d'exister ou d'exprimer son mal être, mais hors des murs. Et c'est à cet affrontement avec le monde extérieur, la vie pas toujours rêvée, un monde souterrain, glauque, fangeux, que nous assistons, impuissants et, finalement, un peu, voire terriblement désabusés.

 

L'écriture est vive, alerte. L'oeil est incisif. Et là où le détail du trait pourrait nous livrer une image un peu vaine de la société, Ilmann Bel, au contraire, nous jette, comme à la figure, sans respect ni honte, comme acteur malgré lui : racaille de pacotille, rebeu d'un jour un peu paumé, et prisonnier d'une sexualité furieuse, la décadence dans laquelle il la voit se débattre et perdre son ferment.

 

Mais, après tout, cela lui déplait-il vraiment ? Peut-être nous le dira-t-il dans un prochain roman.

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