Publié par Gérard Glatt

la-rafle.jpgOn s'interroge parfois sur le bon sens de certains et les leçons qu'ils veulent donner.

 

Le bloc-notes de Bernard-Henri Lévy, dans l'hebdomadaire Le Point, se prête parfaitement à cette interrogation. Toujours péremptoire et certain de lui, comme s'il était seul à détenir le vrai, ce qui n'est pas toujours faux, d'ailleurs, je le reconnaîs volontiers, le voici qui, par le biais d'un amalgame hasardeux, après avoir fustigé Martin Scorsese et son exemplaire Shutter Island, magnifie La Rafle, le film (presque raté, il s'en faut de peu) de Rose Bosch.

 

Parlant de La Rafle, Bernard Henri Lévy " se réjouit que ce film existe " (Le Point - N° 1957). Moi aussi, c'est évident, malgré sa tiédeur, je ne peux qu'applaudir à la réalisation d'un tel film. Hélas, il faut tout de même le dire, les pitreries de Hitler et la mièvrerie de Laval, flanqué d'un Pétain aussi caricaturé et peu crédible que les deux autres, ôtent, du fait de leurs interventions périodiques, toute son horreur à l'inconcevable, à l'inimaginable drame qui s'est joué les 16 et 17 juillet 1942. Rose Bosch, qui, ici, faisait oeuvre d'historienne, à ce que l'on a cru entendre, aurait pu, je veux dire : aurait dû, nous épargner de tels dérapages. La mémoire y aurait au moins trouvé son compte, à défaut de l'art.

 

shutter-island.jpgBien au contraire, Shutter Island, qui n'a pas du tout les mêmes prétentions, est lui, parfaitement maîtrisé. C'est déjà un bon point. Et malgré ce qu'aurait peut-être souhaité Bernard-Henri Lévy, Martin Scorsese ne se dit pas historien d'un épisode hautement dramatique de l'Histoire du monde, même si la référence au nazisme et la présence lancinante d'un ancien nazi " recyclé, après la guerre, " (Le Point - n° 1955) sont plus que dérangeantes.

 

Ce que Martin Scorsese nous livre, c'est tout d'abord un thriller. Un film noir. Et comme dans tous thrillers, nous avons affaire à des personnages qui ont eu, dans leur vie et dans l'idée de celui qui les a imaginés, des épisodes plus ou moins glorieux, plus ou moins traumatisants, plus ou moins troubles : l'action se passe dans une île, au large de Boston, au début des années 50, et le héros, policier chargé d'une enquête, a fait la guerre. Je n'en dirai pas davantage. C'est donc à partir de ces éléments de base que, située dans un contexte donné, se déroule Shutter Island. Ici, comme le dit si bien Bernard-Henri Lévy : " L'art y trouve son compte. " (Le Point - n° 1955). Mais il a tort, quand il ajoute : " Pas la mémoire. " Car cette mémoire, dont il parle, n'a rien à voir avec la mémoire de l'Histoire, avec un H majuscule, celle que traite Rose Bosch, dans La Rafle.

 

A vouloir lire entre les lignes, à n'importe quel prix, on ne finit pas seulement par mésinformer : on invente les non-dits pour mieux satisfaire ses propres obsessions.

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